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Une nouvelle fois, Albion convoite Dunkerque.

Le 25 avril 1793, la flotte anglaise bloque le port (temporairement) le sommant de se rendre, et le duc d'York marche vers la ville qu'il investit le 23 août. Le siège sera levé après la victoire française d'Hondschoote, le 8 septembre, qui contraint l'assaillant à se replier.

 

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Bataille d'Hondschoote (gravure d'après Eugène Lami)

 

 

Plus tôt, le 9 avril, le général Pascal de Kerenveyer (3), commandant la place menacée, avait établi son quartier général à Téteghem.

C'est de là qu'il informera la Convention de la sommation reçue de l'ennemi et de sa fière réponse adressée en retour.

Les voici, extraites d'un livre de l'historien Derode (4).

 

Téteghem, 25 avril

Citoyen président,

J'ai l'honneur de vous annoncer que le chef d'escadre anglaise, sir John Clement, m'a fait passer cette nuit la lettre dont ci-incluse est copie.

J' y joins la réponse que j'y ai faite. Notre correspondance sera plus énergique qu'éloquente.

Assurez les représentants de la Nation que je suis entêté comme un Breton et que je ne capitule pas.

Monsieur,

Ayant l'honneur de commander une escadre des vaisseaux de guerre de Sa Majesté britannique, destinée à croiser devant Dunkerque, et prête à coopérer, avec les forces qui s'avancent par terre, à réduire cette ville jadis si florissante, je prends la liberté de vous dire que si vous avez quelques propositions à faire pour arrêter les progrès d'une guerre qui doit inévitablement envelopper la ville et les habitants de Dunkerque dans une ruine et destruction totale, je suis prêt à les recevoir et à assurer l'inviolabilité des propriétés des habitants.

Je vous invite, Monsieur, et tous les habitants de Dunkerque à prendre très sérieusement en considération les tristes effets qui résulteraient pour vous et vos familles d'un refus de cette offre conciliatrice pour prévenir une plus grande effusion de sang et mettre fin à une guerre si destructrice pour les vrais intérêts de votre pays.

Je suis envoyé pour vous offrir la protection d'une grande et honorable puissance, jusqu'à ce que votre Constitution soit établie sur des bases solides (5) ... 

 

Monsieur,

J'ai reçu la lettre que vous avez pris la peine de m'écrire pour m'annoncer vos projets et les ordres dont vous êtes chargé. Je n'ai qu'un mot à y répondre : c'est que moi qui ai l'honneur de commander dans la ville de Dunkerque ni aucun habitant n'entendrons jamais à aucune proposition tendant à déshonorer le nom français.

Ainsi, Monsieur, il est inutile de perdre son temps à un échange de lettres, ce qui deviendrait fastidieux et qui serait du moins illégal.

Faites-moi l'honneur de m'attaquer, j'aurai celui de vous riposter militairement. C'est ainsi que se terminent les différends entre gens de notre robe.  (5)

Le Legerveld, lieu-dit de Téteghem, doit son nom au cantonnement des troupes françaises à cet endroit : c'est le champ de l'armée (leger : armée, veld : champ, en flamand).

 

Gérald Mennesson

1- La République a été proclamée le 21 septembre 1792.

2- Romain ROLLAND, Le triomphe de la Raison, acte I, scène 1.

3- François Nicolas Pascal de Kerenveyer (1729 Finistère-1794 Oise), militaire et écrivain, qui traduisit en breton Les Métamorphoses d'Ovide.

4- Victor DERODE, Histoire de Dunkerque, 1852, p. 377.

5- Autrement dit le rétablissement de la monarchie.